Comment les ossements de l'Apôtre ont été identifiés… (article de Vatican News du 19/06/2024)
« Du sommet de la coupole, à plus de 133 mètres, jusqu’à l’endroit où reposent les restes de saint Pierre, à quelques mètres sous le sol de l’actuelle basilique, se devine un fil invisible qui retrace des siècles d'histoire. Aujourd’hui visitable, la tombe de saint Pierre n’a pourtant été redécouverte qu’il y a quelques dizaines d’années.
À sa mort en 1939, Pie XI demande à être enterré près de la tombe de st Pierre. Un an plus tard, Pie XII, son successeur ose alors lancer des fouilles inédites sur le lieu supposé de la tombe de saint Pierre, presque 1900 ans après son martyre. Crucifié dans le cirque de Néron, sur la rive droite du Tibre à Rome, l’apôtre Pierre est enterré non loin, sur la colline avoisinante faisant office de nécropole, au milieu de nombreux anonymes. Aucun signe n’a été conservé dans les archives de l’Empire romain concernant cet insignifiant pécheur galiléen. Mais les chrétiens ont gardé la trace de ce lieu hautement sacré, lieu de pèlerinage depuis presque deux millénaires. Signalé d’abord par un simple édicule, forme de petite chapelle, appelé le triomphe de Gaïus, la tombe de l’Apôtre s’est vue honorée par différents autels dans la basilique constantinienne, puis celui actuel, commandé par Clément VIII en 1549, à l’ombre du baldaquin du Bernin.
Toutefois seule la transmission orale prouvait la réalité de la tombe de saint Pierre, jusqu’aux fouilles des
années 1940, compliquées par la Seconde Guerre mondiale, et surtout jusqu'à l’annonce retentissante de Pie XII lors du message radiophonique de Noël du 23 décembre 1950, à la fin de l'Année Sainte : « la tombe du Prince des Apôtres a été retrouvée ». Mais, le Pape poursuit en expliquant qu’il est impossible d’affirmer que les ossements retrouvés parmi tant d’autres dans cette nécropole du 1er siècle ont appartenu à l’apôtre.
En 1952, l’archéologue et épigraphiste florentine Margherita Guarducci prend la direction des fouilles et va faire une découverte extraordinaire. Spécialiste des inscriptions réalisées de main d’homme, elle travaille sur les nombreux graffiti retrouvés sur les murs du triomphe de Gaïus. Ces inscriptions témoignent de l'activité dévotionnelle et de tout un mouvement des 1ers fidèles de la communauté de Rome qui se sont rendus près de cet édicule, pour honorer la mémoire du 1er pape.
Margherita Guarducci se met au travail et déchiffre les différents graffiti parmi lesquels, « Petros eni », c'est-à-dire en grec « Pierre est ici ». Près de cette inscription, elle retrouve une boîte précieusement décorée de porphyre insérée dans un trou creusé dans un mur du triomphe de Gaïus. Les ossements contenus dans cette boîte sont ensuite analysés et correspondent à un homme d’une soixantaine d’année et perclus d’arthrose, la maladie des pêcheurs. Saint Pierre est retrouvé.
Pour Fiocchi Nicolai, professeur de topographie des cimetières chrétiens à l'Institut pontifical d'archéologie chrétienne, « lorsque la capsule constantinienne a été créée, on aurait pris ce qui restait des ossements de Pierre dans la fosse du tombeau et on les aurait placés dans la boîte murale pour les sauvegarder pour l’éternité ».
Une découverte corroborée par les textes les plus anciens, comme celui d’Eusèbe de Césarée au IVe siècle, qui dans ses Historiae ecclesiasticae (II 25, 5-7) fait parler un certain Gaïus, qui assure qu’il peut montrer les tombeaux des apôtres Pierre et Paul, respectivement au Vatican et sur le chemin d’Ostie.
Lors de l'audience générale du 26/06/ 1968, le Pape Paul VI, rappelant les enquêtes et les études passées, tout en précisant que «les recherches, les vérifications, les discussions et les controverses ne s'épuiseront pas avec cela», a fait une «heureuse annonce»: «il nous faut être d'autant plus prompts dans notre joie que nous avons toute raison de croire que l'on a retrouvé les restes mortels -réduits mais sacro-saints- du Prince des Apôtres, de Simon fils de Jonas, du pêcheur appelé Pierre par le Christ, de celui qui fut choisi par le Christ comme fondement de l'Église, à qui le Seigneur a confié les clefs de son royaume, avec la mission de paître et de réunir son troupeau, l'humanité rachetée, jusqu'à son retour final et glorieux». Depuis les années 1980, les fouilles de la basilique Saint-Pierre sont accessibles au public, proposant aux fidèles un véritable pèlerinage au plus près des origines de l'Église
DOM GUERANGER : « Parce que le monde sous ta conduite s’est élevé triomphant jusqu’aux cieux, Constantin vainqueur construisit ce temple à ta gloire. » C’était l’inscription qui, dans l’ancienne basilique vaticane, se détachait en lettres d’or au sommet de l’arc triomphal. Jamais en moins de mots le génie romain ne s’exprima si magnifiquement ; jamais n’apparut mieux la grandeur de Simon fils de Jean sur les sept collines. En 1506, la sublime dédicace tombant de vétusté périt avec l’arc sous lequel, à la suite du premier empereur chrétien, peuples et rois, le front dans la poussière, s’étaient pressés durant douze siècles en présence de la Confession immortelle, centre et rendez-vous du monde entier. Mais la coupole lancée dans les airs par le génie de Michel-Ange, désigne toujours à la Ville et au monde le lieu où dort le pêcheur galiléen, successeur des Césars, résumant dans le Christ dont il est le Vicaire les destinées de la ville éternelle. La seconde gloire de Rome est la tombe de Paul sur la voie d’Ostie. Ainsi la Rome chrétienne est protégée au nord et au midi par ces deux citadelles. Associons-nous aux sentiments de nos pères, lorsqu’ils disaient de la cité privilégiée : « Pierre, le portier, fixe ! à l’entrée sa demeure sainte ; qui niera que cette ville soit pareille aux cieux ? A l’autre extrémité, Paul, de son temple, en garde les murs ; Rome est assise entre les deux : là donc est Dieu. » Donc aussi la présente fête méritait d’être plus qu’une solennité locale ; l’Église mère, en l’étendant à toute Église dans ces derniers siècles, a mérité la reconnaissance du monde. Grâce à elle, nous pouvons tous ensemble aujourd’hui faire en esprit ce pèlerinage ad limina que nos aïeux accomplissaient au prix de tant de fatigues, ne croyant jamais en acheter trop cher les saintes joies et les bénédictions. « Célestes monts, sommets brillants de la Sion nouvelle ! là sont les portes de la patrie, les deux lumières du monde en sa vaste étendue : là, Paul comme un tonnerre fait entendre sa voix ; là, Pierre retient ou lance la foudre. Par celui-là les cœurs des hommes sont ouverts, par celui-ci les cieux. Celui-ci est la pierre de fondement, celui-là l’ouvrier du temple où s’élève l’autel qui apaise Dieu. Tous deux, fontaine unique, épanchent les eaux qui guérissent et désaltèrent. » |