Selon saint Éphrem (306-373)
Dans son Commentaire sur l'Évangile, il relève :
- un signe qui annonce l'accomplissement de l'Ancien Testament (§7).
- un signe des noces de Dieu (§8).
- une annonce de la passion (§9), sous-entendu le thème de l'heure (Jn 2, 4).
- Le troisième jour de Cana, allusion au jour de la résurrection (§11).
- une annonce de la transfiguration de toutes choses (§12).
§ 7. Les urnes conçurent et mirent au monde, contrairement à leur usage, un vin nouveau ; [...]
Les bassins servaient aux purifications des Juifs : Notre-Seigneur y versa sa doctrine, pour manifester qu'il était venu selon la voie de la loi et des prophètes, mais en vue de tout changer par son magistère, comme l'eau devenue vin. [...]
§ 8. L'époux terrestre a invité l'époux céleste, et le Seigneur, prêt pour les noces, s'y est rendu. [...]
§ 9. Ils l'ont invité, et il est venu à eux ; puis lui-même les a invités, et ils ne sont pas venus à ses noces.
Ils l'ont appelé et il n'a pas refusé de venir ; lui-même les a appelés et ils ont refusé son repas. [...]
§ 11. Il était revenu triomphant du combat au désert ; les noces le reçurent avec joie le troisième jour. Il manifesta ainsi qu'après le choc des combats, il y a de la joie pour les vainqueurs. [...]
§ 12. Il a transformé les mêmes créatures antérieures, afin de manifester par là qu'il en est le maître, et pour que l'on sache, par le fait qu'il ne les dédaignait pas, qu'elles ne sont ni méprisées, ni réprouvées. Bien plus, à la fin des temps, ces mêmes créatures seront renouvelées, parce que cette volonté qui, par un ordre, a changé rapidement de l'eau commune en vin doux, a la puissance de rendre à toutes les créatures, dans la consommation finale, une inexprimable saveur.»
Selon saint Thomas d’Aquin :
Au sens mystique, les noces signifient l'union du Christ et de l'Église - « C'est là un grand mystère, je l'entends du Christ et de l'Église » (Ep 5,32). À la vérité, ces épousailles eurent leur commencement dans le sein de la Vierge, lorsque Dieu le Père unit la nature humaine à son Fils dans l'unité de la personne, en sorte que le lit nuptial de cette union - « Dans le soleil, il dressa sa tente » (Ps 18) - fut ce sein virginal. De ces noces il est dit : « Le Royaume des cieux ressemble à un roi qui fit les noces de son fils ». (Mt 22,2), ce qui se réalisa à l'heure où Dieu le Père a uni à son Verbe la nature humaine dans le sein virginal. Ce mariage fut rendu public lorsque l'Église s'est unie au Verbe par la foi - « Je t'épouserai dans la foi » dit le Seigneur (Os 2,22). De ces noces, l'Écriture dit : « Elles sont venues les noces de l'Agneau, et son épouse s'y est préparée » (Ap 19,7). Et ces épousailles seront consommées lorsque l'épouse, c'est-à-dire l'Église, sera introduite dans le lit nuptial de l'Époux, dans la gloire céleste : « Heureux ceux qui ont été appelés au repas des noces de l'Agneau » (Ap 19,9).
Le fait que ces noces eurent lieu le 3ème jour n'est pas sans signification. Le 1er jour est en effet le temps de la loi naturelle, le 2nd celui de la Loi écrite ; quant au 3ème, c'est le temps de la grâce où le Seigneur, né dans la chair, célébra ses noces - « Après 2 jours, il nous rendra la vie ; le 3ème jour il nous relèvera et nous vivrons en sa présence » (Os 6,2). Au sens mystique, il faut comprendre qu'aux noces spirituelles, la Mère de Jésus, la Vierge bienheureuse, est présente en qualité de conseillère des noces, car c'est par son intercession que nous sommes unis au Christ par la grâce - « En moi est toute espérance de vie et de force » (Sir 24,25). Le Christ, Lui, y est présent en tant que véritable Époux de l'âme, comme le dit Jean Baptiste : « Celui qui a l'épouse est l'époux » (Jn 3,29). Quant aux disciples, ils sont là en qualité de compagnons des noces, pour unir l'Église au Christ, comme le dit l'un d'entre eux : « Je vous ai fiancés à un époux unique, comme une vierge pure à présenter au Christ» (2 Co 11,2).
Par le Père Daniel Ange
Ce signe, Il a voulu le faire tout simplement pour la joie des jeunes mariés. Non pas pour ouvrir les yeux d’un aveugle. Même pas pour ressusciter un mort (ce sera le dernier de ses grands signes, juste avant son ultime repas). Non, c’est tout simplement, comme si Jésus, de suite après avoir appelé ses premiers disciples à la consécration dans le célibat d’amour, avait voulu – devant eux, et avec eux – consacrer, sanctifier, christifier, diviniser le mariage. Faire de cette belle réalité humaine un mystère. Jésus l’élève au niveau d’un sacrement, d’un signe où passe sa vie divine : sa grâce !
Depuis, le mariage chrétien, en devient une vocation, un appel très précis, et non pas seulement une belle valeur humaine, indispensable à toute vie humaine, à toute vie en société. C’est infiniment plus ! Personne n’est forcé de ‘se marier à l’Église’, c’est-à-dire, en Dieu et pour Dieu. Mais si on le fait, librement, lucidement, c’est pour joyeusement aimer son conjoint, comme le Christ-Jésus lui-même aime son Église, et t’aime, toi : jusqu’à donner sa vie, verser son sang pour elle, pour toi. Non, ce n’est pas pour rire, pour frimer, quand ce n’est pour toujours en Jésus ! C’est pour recevoir de Lui un amour capable d’aller jusqu’à se livrer à la mort, plutôt que renier, celui/celle que j’ai assumé en mon cœur, en ma chair, en ma vie.
Et il y a plus encore : l’union de l’homme et de la femme devient le signe - incarné dans la chair - de l’union même de Jésus avec son Père. D’où jaillit l’Esprit Saint : la vie. L’amour entre un homme et une femme est scellé dans un amour mutuel d’une incandescence fulgurante, insurpassable, qui circule entre le Père et le Fils.